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La maladie de Wilson : une urgence diagnostique - 22/11/15

Doi : 10.1016/j.revmed.2015.10.223 
A. Bauvois 1, , G. Bayer 1, F. Labarthe 2, F. Maillot 3, J. Mankikian 4, A. Poujois 5, M. Tardieu 2, F. Woimant 5, A. Legras 4
1 Médecine interne, CHRU Hôpitaux de Tours, Tours, France 
2 Médecine pédiatrique, CHRU Hôpitaux de Tours, Tours, France 
3 Médecine interne, CHRU Bretonneau, Tours, France 
4 Réanimation médicale, CHRU Hôpitaux de Tours, Tours, France 
5 Centre national de référence de la maladie de Wilson, hôpital Lariboisière, Paris, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

La maladie de Wilson est une maladie rare et grave, dont le retard au diagnostic peut engendrer des situations dramatiques. Nous vous rapportons le cas d’une jeune patiente atteinte de maladie de Wilson non diagnostiquée évoluant depuis plusieurs années.

Observation

Une jeune fille de 16ans a été adressée aux urgences par son médecin traitant pour des hématomes à répétition depuis environ un an, associés à une thrombopénie à 34G/L et leucopénie à 1,6G/L. Le myélogramme était normal. Un interrogatoire et un examen clinique plus approfondis ont alors révélé des troubles neurologiques évoluant depuis trois ans. Alors que la patiente avait un développement psychomoteur et une scolarité normaux, sont apparus progressivement, une régression intellectuelle et une déscolarisation l’obligeant à vivre en foyer spécialisé. Ses troubles se sont aggravés avec l’apparition de troubles de la marche et de chutes fréquentes. Cette dégradation a été attribuée au divorce de ses parents, et n’a été explorée qu’au moyen de bilans psychologiques. L’examen neurologique montrait un signe de babinski bilatéral, un grasping, une marche à petits pas avec piétinements ainsi que des troubles de l’élocution, une dysgraphie et une dyscalculie. Une hyper-sialorrhée et une hépato-splénomégalie ont été retrouvés. Le bilan biologique montrait des anomalies de la coagulation, un TP à 58 % avec un facteur V à 51 % sans cytolyse ni cholestase. Devant cette présentation clinique et biologique, nous avons suspecté une maladie de surcharge, en particulier la maladie de Wilson. La cuprémie était à 613μg/L [700–1500], la cuprurie était élevée à 330μg/L [10–50], le cuivre échangeable 3,0μmol/L [0,62–1,15], la céruléoplasmine effondrée à 0,07g/L [0,16–,45]. Un anneau de Kayser-Fleischer bilatéral était visualisé à la lampe à fente. L’échographie abdominale montrait une hépato-splénomégalie, un score de fibrose évalué à F4 en élastographie. L’IRM cérébrale montrait d’importantes lésions des noyaux gris centraux, un aspect en « tête de panda géant » très évocatrices d’une maladie de Wilson. Le traitement par d-pénicillamine était débuté, la posologie était adaptée sur le suivi du cuivre échangeable. Le bilan complémentaire confirmait le stade de cirrhose avec hypertension portale par le fibroscan puis par l’IRM hépatique. L’évolution sous traitement était rapidement défavorable nécessitant une nouvelle hospitalisation et un transfert rapide en réanimation médicale. Elle s’aggravait sur le plan hépatique mais surtout sur le plan neurologique avec des troubles de la déglutition, de l’élocution et la majoration des troubles de l’équilibre, imposant l’inscription sur la liste de transplantation hépatique en super urgence.

Discussion

La maladie de Wilson est une affection génétique de transmission autosomique récessive rare, dont la prévalence, probablement sous-estimée est de 1/30 000. Elle est liée à une mutation du gène ATP7B codant pour une ATPase, impliquée dans l’excrétion biliaire du cuivre. Le déficit fonctionnel de l’enzyme conduit à une accumulation toxique du cuivre dans l’organisme, principalement dans le foie (42 % des cas) et le cerveau (34 % des cas) avec des manifestations cliniques variées. Chez l’enfant, le mode de révélation le plus fréquent est hépatique, les manifestations neurologiques apparaissant le plus souvent chez l’adolescent et à l’âge adulte. C’est ce qui explique principalement le retard diagnostique de la maladie chez notre patiente, qui a manifesté des signes neurologiques dès l’âge de 12ans sans signe hépatique associé. Sans diagnostic et sans traitement, le tableau neurologique s’est aggravé. Le traitement repose soit sur la chélation par D-pénicillamine ou trientine soit sur l’inhibition de l’absorption du cuivre par zinc. Il existe un risque d’aggravation initiale de la symptomatologie neuropsychiatrique sous traitement, pas toujours réversible, plusieurs facteurs de risque ont été identifiés : une mauvaise observance, un taux de cuivre échangeable très élevé au diagnostic ainsi que les lésions cérébrales corticales. Après un mois et demi de traitement, l’aggravation brutale et très sévère de l’atteinte neurologique nous a conduit à poser l’indication de la transplantation hépatique.

Conclusion

Les manifestations neurologiques sont un mode de révélation assez inhabituel chez l’enfant dans la maladie de Wilson, ce qui peut engendrer un retard de prise en charge diagnostique et thérapeutique, comme illustré dans notre observation. Une telle gravité du tableau neurologique est par ailleurs exceptionnelle et nécessite un traitement d’urgence.

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Vol 36 - N° S2

P. A208 - décembre 2015 Retour au numéro
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